La paupière tombante, médicalement appelée ptosis, est un signe clinique qui peut révéler une multitude de causes. Elle peut être bénigne, liée à l’âge, ou au contraire traduire une maladie neurologique grave. Dans certains cas, elle est le premier indice d’un trouble sous-jacent nécessitant un diagnostic rapide. Comprendre les causes neurologiques d’un ptosis est donc essentiel pour identifier la maladie, orienter le traitement et prévenir des complications potentielles.
Qu’appelle-t-on exactement une paupière tombante (ptosis) ?
Le ptosis est défini comme un abaissement anormal de la paupière supérieure. Cette chute peut être partielle ou complète, unilatérale ou bilatérale. Elle résulte d’un dysfonctionnement :
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Du muscle releveur de la paupière (musculus levator palpebrae superioris).
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Du muscle de Müller, à commande sympathique.
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Des nerfs qui contrôlent ces muscles.
Un ptosis peut être congénital (présent dès la naissance) ou acquis (apparaissant au cours de la vie). C’est dans cette deuxième catégorie que l’on retrouve des causes neurologiques.
Quels sont les différents types de ptosis ?
Pour mieux comprendre la part des maladies neurologiques, il est utile de classer les ptosis :
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Ptosis aponeurotique : lié à l’âge ou à une distension du tendon du muscle releveur.
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Ptosis mécanique : causé par une masse, une tumeur ou une cicatrice qui pèse sur la paupière.
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Ptosis myogène : lié à une atteinte musculaire (ex. dystrophie musculaire).
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Ptosis neurogène : lié à une atteinte nerveuse, donc souvent d’origine neurologique.
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Faux ptosis : illusion d’une paupière tombante, par exemple en cas d’hypotropie de l’œil.
C’est le ptosis neurogène qui nous intéresse, car il traduit une atteinte du système nerveux central ou périphérique.
Quelles maladies neurologiques peuvent provoquer une paupière tombante ?
Plusieurs pathologies neurologiques peuvent être responsables d’un ptosis. Les plus fréquentes sont :
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La myasthénie grave.
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Le syndrome de Claude Bernard-Horner.
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La paralysie du nerf oculomoteur (III).
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Certaines neuropathies périphériques.
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Les atteintes du tronc cérébral ou des voies sympathiques.
La myasthénie grave peut-elle être responsable d’une paupière tombante ?
Qu’est-ce que la myasthénie grave ?
La myasthénie grave est une maladie auto-immune rare qui perturbe la communication entre les nerfs et les muscles. Elle est due à la présence d’anticorps dirigés contre les récepteurs de l’acétylcholine situés à la jonction neuromusculaire.
Comment provoque-t-elle un ptosis ?
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Le blocage de la transmission neuromusculaire entraîne une fatigabilité musculaire.
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Les muscles des yeux et des paupières sont particulièrement sensibles.
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Le ptosis apparaît en fin de journée ou après un effort visuel.
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Il peut être unilatéral ou bilatéral, variable dans le temps.
Quels autres signes accompagnent le ptosis ?
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Diplopie (vision double).
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Faiblesse des muscles faciaux.
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Fatigue généralisée.
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Dans les formes graves : atteinte respiratoire.
Diagnostic et traitement
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Tests cliniques : signe de Cogan, test au glaçon.
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Examens biologiques : recherche d’anticorps anti-récepteurs AChR.
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Traitement : inhibiteurs de la cholinestérase, corticoïdes, immunosuppresseurs, thymectomie.
Qu’est-ce que le syndrome de Claude Bernard-Horner et comment provoque-t-il un ptosis ?
Définition
Le syndrome de Claude Bernard-Horner est une triade clinique causée par une atteinte de la voie sympathique oculaire.
Quels sont ses signes ?
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Ptosis discret (atteinte du muscle de Müller).
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Myosis (pupille rétrécie).
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Anhidrose (absence de sudation sur le visage du côté atteint).
Quelles sont les causes possibles ?
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Lésion du tronc cérébral (AVC, tumeur).
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Lésion de la moelle épinière cervicale.
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Atteinte du plexus brachial (ex. tumeur de Pancoast au sommet pulmonaire).
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Dissection de l’artère carotide.
Importance diagnostique
Un Horner peut révéler une urgence vitale comme une dissection carotidienne ou une tumeur maligne.
Comment une paralysie du nerf oculomoteur (III) peut-elle donner un ptosis ?
Rôle du nerf oculomoteur
Le nerf crânien III commande :
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Le muscle releveur de la paupière.
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Plusieurs muscles de l’œil (droit supérieur, droit inférieur, droit médial, oblique inférieur).
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Le sphincter de la pupille.
Conséquences d’une paralysie
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Ptosis complet (paralysie du releveur).
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Déviation de l’œil « en bas et en dehors ».
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Diplopie sévère.
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Mydriase (pupille dilatée) si les fibres parasympathiques sont atteintes.
Causes fréquentes
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Anévrisme intracrânien (surtout de l’artère communicante postérieure).
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AVC du tronc cérébral.
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Traumatisme crânien.
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Neuropathie diabétique ou hypertensive.
Caractère urgent
Un ptosis brutal avec mydriase doit alerter immédiatement sur une possible rupture ou menace de rupture d’anévrisme.
Quelles autres affections neurologiques peuvent causer un ptosis ?
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Sclérose en plaques (SEP) : peut donner des troubles oculomoteurs, parfois associés à un ptosis.
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Maladies neuromusculaires héréditaires (dystrophies, dystrophie oculopharyngée).
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Syndromes myopathiques mitochondriaux (ophtalmoplégie externe chronique progressive).
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Atteintes du tronc cérébral : lésions touchant les noyaux oculomoteurs.
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Neuropathies périphériques multiples (syndrome de Guillain-Barré, amyloïdose).
Comment différencier un ptosis d’origine neurologique d’autres causes ?
Interrogatoire
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Début brutal ou progressif.
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Variabilité dans la journée.
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Antécédents médicaux (diabète, cancer, maladies auto-immunes).
Examen clinique
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Recherche de signes associés : diplopie, myosis, déficit moteur, troubles sensitifs.
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Réflexe photomoteur.
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Amplitude d’ouverture palpébrale.
Examens complémentaires
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IRM ou scanner cérébral et orbitaire.
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Bilan sanguin auto-immun.
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Tests électrophysiologiques.
Le ptosis peut-il représenter un danger vital ?
Oui, dans certains cas :
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Anévrisme intracrânien menaçant.
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Dissection carotidienne.
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Tumeur pulmonaire (pancoast).
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Syndrome myasthénique avec atteinte respiratoire.
Le ptosis n’est pas toujours une urgence, mais il peut être le seul signe d’une maladie grave.
Quels traitements existent pour un ptosis neurologique ?
Le traitement dépend entièrement de la cause :
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Myasthénie grave : traitement immunosuppresseur + anticholinestérasiques.
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Horner : traitement de la cause (tumeur, dissection).
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Paralysie du III : chirurgie si séquelle, mais traitement urgent si anévrisme.
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Pathologies neuromusculaires : kinésithérapie, parfois chirurgie correctrice.
Un traitement chirurgical peut être envisagé si la cause est stabilisée et que la gêne visuelle est importante.
Comment prévenir et surveiller un ptosis neurologique ?
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Consultation ophtalmologique et neurologique précoce en cas de ptosis inexpliqué.
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Surveillance des maladies chroniques (diabète, hypertension, sclérose en plaques).
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Dépistage des maladies auto-immunes.
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IRM cérébrale en cas de doute.
Conclusion
La paupière tombante (ptosis) est loin d’être uniquement un signe esthétique ou lié au vieillissement. Lorsqu’elle est d’origine neurologique, elle peut traduire des maladies auto-immunes (myasthénie grave), neurovasculaires (anévrisme, dissection), neurologiques centrales (SEP, atteinte du tronc cérébral) ou encore neurologiques périphériques (Horner, neuropathies).
Un ptosis doit donc toujours être considéré comme un signe d’alerte, justifiant un diagnostic rapide et parfois une prise en charge urgente.